Comme l’a montré Fernand Braudel, les villes-ports sont les territoires par excellence de la mondialisation. Depuis les années 1970, l’utilisation généralisée du conteneur dans le transport des marchandises marque la dernière étape de ce processus dans les pays de la Triade. Or, au-delà des économies d’échelle réalisées, la conteneurisation tend, fait nouveau, à créer de véritables « régions portuaires » fondées sur des relations de compétition-coopération entre villes-ports. Cet article a pour but de mettre en évidence que le processus de régionalisation en cours constitue la marque, à l’échelle locale, de la mondialisation dans le domaine de la conteneurisation. Il s’appuie en particulier sur l’exemple européen du « Delta d’Or », le débouché de l’artère rhénane, centré autour des ports de Rotterdam, Anvers et Zeebrugge. L’idée de l’émergence d’une véritable région portuaire au milieu de la Rangée Nord se justifie tout d’abord à partir des critères de concentration spatiale, de bipolarité et d’interdépendance entre l’activité des trois ports. L’article explique ensuite le processus de régionalisation à l’œuvre : il s’agit en fait de l’échelle d’action la plus pertinente imaginée par les opérateurs de terminaux internationaux (global) pour déployer leur activité dans un contexte local très tendu (local). Jouer sur la complémentarité entre ports très proches dans le cadre de leurs réseaux de terminaux, leur permet de tirer parti des atouts de chacun de ces ports sur le plan technique, fonctionnel et commercial, tout en contournant les difficultés d’ordre technique, environnemental ou stratégique qui peuvent se présenter ici ou là. Sachant que de nouvelles mutations sont à venir dans l’activité conteneurisée, l’article pose in fine la question de la transformation de cette entité fonctionnelle en véritable territoire, sa gestion raisonnée requérant pour le moins un nouveau mode de gouvernement de la part des autorités publiques de la région.