72 | 2017


1. L’Afrique fluide. Introduction au dossier

Benjamin Steck.

2. L’Afrique dans la logistique mondiale : une approche par les réseaux d’armateurs de lignes maritimes conteneurisées

Marie Metge ; César Ducruet.
Les travaux sur le réseau maritime mondial montrent essentiellement le poids secondaire de l’Afrique et l’influence grandissante de l’Asie dans sa connectivité, au détriment de l’Europe. Cependant, cette approche englobante tend à négliger le rôle des acteurs économiques du transport international, et notamment celui des armateurs, dans l’insertion de l’Afrique dans les flux mondiaux. La combinaison de données récentes inédites de mouvements de porte-conteneurs, de méthodes quantitatives d’analyse de réseau, et d’une analyse plus qualitative des stratégies d’acteurs, permet d’identifier des logiques armateuriales différenciées et inédites, ce qui montre la spécificité de l’Afrique et de ses régions dans le réseau maritime mondial.

3. Dysfonctionnements et entraves à la circulation en Afrique de l'Ouest : l'exemple du corridor Abidjan-Cotonou

Messan Lihoussou.
L’Afrique de l’Ouest s’est dotée d’institutions, de mécanismes et de textes juridiques pour promouvoir un espace communautaire intégré. L’un des principaux objectifs est de faciliter les échanges commerciaux et les flux humains. Les infrastructures de transport sont identifiées comme les instruments indispensables de ces processus de développement territorial. Mais les discours institutionnels sont très éloignés des pratiques des acteurs de terrain. De très nombreux dysfonctionnements entravent la fluidité des circu¬lations sur les corridors, maillons déterminants de l’intégration régionale. Les opérateurs économiques en pâtissent et les populations expriment leur frustration, d’autant qu’il est difficile de concilier les exigences des acteurs de la mondialisation et les impératifs d’un développement pour tous. Une intégration régionale réussie suppose que, par-delà la fluidité améliorée des circulations, soit rendue possible leur capacité à féconder les territoires traversés au profit des économies et des sociétés dont elles impactent la vie quotidienne. Le corridor littoral Abidjan-Cotonou offre un intéressant champ d’expérimentation. Ce texte s’appuie sur une étude du transport par voie routière des flux de ciment opérés par la société Dangote, exemplaire des questions posées par l’intégration régionale en termes d’efficacité mais aussi en termes de dégradation sociale et environnementale.

4. Pays en voie de développement et qualité de service d'une nouvelle compagnie d'aviation : le cas de Congo Airways

Jacques Riziki Mulumba ; Frédéric Dobruszkes ; Hugo Mwanza Wa Mwanza.
La concurrence croissante dans le transport aérien induit la nécessité pour les compagnies de se distinguer par le prix et/ou par la qualité de leurs services. Dans les deux cas, la littérature existante néglige largement les pays en voie de développement. Le présent article vise à compenser cette lacune en étudiant la qualité de service de la compagnie Congo Airways. Tant les attentes que la satisfaction de ses passagers ont été analysées par le biais d’une enquête conduite à l’aéroport international de Goma (République Démocratique du Congo). Les résultats montrent une bonne perception du service, mais cependant presque systématiquement légèrement inférieure aux attentes, ce qui suppose une insatisfaction. Les résultats montent aussi clairement la diversité de la clientèle tant en termes d’attente que de perception. Sur le plan managérial, il en découle que Congo Airways pourrait utilement chercher à améliorer l’ensemble des critères considérés. Sur le plan scientifique, notre étude gagnerait à être répétée dans le cadre de pays en voie de développement avant de pouvoir tirer des conclusions plus générales.

5. Grande vitesse, gares et projets métropolitains à Rabat (Maroc). Du transport à la production urbaine, les ambiguïtés de la fluidité

Nacima Baron.
L'article interroge la notion de fluidité pour qualifier les interactions entre transport et aménagement de l'espace au Maroc. Il aborde en particulier le sujet de la construction de lignes à grande vitesse au Maroc, et propose une lecture de l'insertion urbaine d'un projet de rénovation de gare à Rabat. Pour ce faire, l'auteur se positionne au croisement des champs de la géographie urbaine, de l'aménagement et des politiques publiques et mobilise deux méthodes de recherche, l'analyse des discours publics et l'étude des docu¬ments de planification. L'article débute par une réflexion théorique sur la fluidité réticulaire, en vue de dégager une typologie des différents registres de justification politique de la grande vitesse dans ce pays. Par la suite, l'étude de la future gare Agdal à Rabat révèle comment la fluidité opère à la fois sur le plan spatial, avec la valorisation de la mobilité urbaine, et sur le plan des stratégies urbaines, en flexibilisant en même temps le mouvement des passagers et le processus capitalistique de production urbaine.

6. Mobilité quotidienne à Brazzaville : l’adaptation du transport artisanal à une morphologie urbaine spécifique

Léa Wester ; Frédéric Audard.
Dans un contexte où l’impératif de fluidité se généralise, la mobilité est un enjeu important pour les espaces urbains africains. Les taux de motorisations faibles, les formes urbaines étalées et l’absence de systèmes de transports collectifs institutionnels efficaces rendent les déplacements quotidiens difficiles. Des solutions de déplacement alternatives se développent pour répondre aux besoins de mobilité. Ces transports dits « informels » ou « artisanaux » sont issus d’initiatives de particuliers et permettent aujourd’hui la mobilité quotidienne de plusieurs millions de citadins à travers le monde. A partir du cas de Brazzaville, nous nous interrogeons sur la place que prennent les transports artisanaux dans l’espace urbain des villes au sud du Sahara. Comment se structure l’offre de transport artisanal et quelle dynami¬que lui permet de répondre à des évolutions rapides ? Et dans quelle mesure le transport artisanal tend-il à fluidifier l’espace urbain ? Notre analyse du système de transport intra-urbain de Brazzaville replace spécifiquement les transports artisanaux dans le système urbain global, avant de simuler leur structure et leur dynamique spatiales, à partir de données d’enquêtes propres à cette étude. La démarche de simulation présentée ici est basée sur une approche méthodologique multi-agents.

7. La marche à pied dans les métropoles africaines : le cas de Yaoundé

Valérie Ongolo Zogo ; Boniface Ngah EPO ; Clément Nodem Meli.
Les métropoles africaines font face au désordre urbain avec pour corollaires l’exclusion des pauvres des déplacements motorisés, la conflictualité entre les usagers de la route et le sentiment d’insécurité des piétons. Ce constat, associé à la prise en compte progressive du paradigme de mobilité durable, met en exergue la question de la facilité de la marche à pied dans la ville de Yaoundé, capitale du Cameroun. L’objectif de cet article est d’analyser les facteurs qui sont associés à la marche à pied, à partir des données d’une enquête auprès d’un échantillon aléatoire stratifié de 100 individus dans les communes de la première ceinture du centre-ville. A l’aide d’un modèle Logit binaire qui affecte un niveau de qualité aux variables, nous arrivons à montrer que le temps de trajet, la proximité de la destination, le niveau de sécurité attribué à l’itinéraire emprunté, la présence d’espaces de détente et l’éclairage public favorisent la marche à pied. A contrario, la fréquence des déplacements influence négativement le choix de la marche à pied.

8. Les changements du programme de contrôle automatisé de la vitesse en France comme évolutions d’un système sociotechnique

Laurent Carnis.
Après 15 années de fonctionnement, il est possible d’avoir un retour d’expérience solide sur le fonctionnement du programme de contrôle automatisé de la vitesse en France. Ce programme s’appuiera sur environ 5 000 équipements de terrain au cours de l’année 2017. Il a connu une évolution rapide depuis 2003. Cette contribution revient sur les changements opérés depuis sa mise en œuvre. Plus précisément, il s’agit de revenir sur les « changements du changement », les inflexions qu’a connues le programme depuis sa mise en œuvre, ses adaptations à son environnement. Il s’agit plus particulièrement de s’intéresser aux dimensions fonctionnelles du programme et ses conséquences. On verra ainsi qu’il existe des inflexions notables, dont certaines soulèvent de nouvelles interrogations pour le futur.